Présentation:
Retrouvons le temps d’une lecture, l’auteur rouennais Pierre Thiry qui après Isidore Tipéranole et les trois lapins de Montceau-les-Mines et Ramsès au pays des points- virgules nous invite à découvrir son nouvel ouvrage : Le Mystère du pont Gustave-Flaubert.
Dès la première de couverture, l’attention du lecteur est captivée par ce pont, objet architectural insolite qui sert de point de départ à ce que Pierre Thiry appelle son « essai de roman ».
Le mot Mystère avec son M majuscule nous interpelle car il semble décrire à lui seul le livre à travers une gigantesque mise en abyme tout aussi impressionnante que l’armature du pont elle-même , représentant ce lien qui coexiste entre un auteur célèbre pour ses écrits : Gustave Flaubert et un pont somme toute banal comme bien d’autres ponts mais qui pour Pierre Thiry sera l’occasion inattendue de rêver autour des rapports de la ville de Rouen avec la littérature. Gustave Flaubert devient à son tour un pont, entre des personnages multiples: fictifs et réels, entre des genres différents: littérature et musique, entre un auteur d’hier et un auteur d’aujourd’hui, deux imaginaires qui se retrouvent sur un même pont dans une même ville…
Ce pont nous élève symboliquement pour nous éloigner de la réalité et pour nous laisser cueillir le plaisir d’errer dans les recoins de l’imagination fantasque de l’auteur.
Cette fiction surréaliste, place son action lors de l’Armada de Rouen, vaste rassemblement de voiliers qui se déroule tous les 4 ans, qui débute dans le livre le 5 juillet ….2017 pour se terminer au moment où les grands voiliers quittent le port de Rouen en passant sous le pont Gustave-Flaubert, une semaine plus tard. Pierre Thiry s’amuse ici même à défier le temps en projetant son récit dans un futur où présent et passé se superposent, la ligne du temps est définitivement rompue et nous fait décoller pour un autre monde: là où tout est possible.
L’histoire :
L’intrigue principale est une enquête menée par le détective privé Jules Kostelos pour retrouver le vélo volé du commissaire Jeton aux abords du pont Gustave-Flaubert.
Ce livre foisonne d’imagination et nous embarque dès les premières pages dans une folle escapade empruntant des chemins de traverse pour partir à la recherche d’un vélo volé, ce qui nous mènera à une pérégrination autour d’un opéra de Giovanni Bottesini compositeur oublié contemporain de Gustave flaubert, l’occasion pour Pierre Thiry de s’interroger sur les rapports de Flaubert avec la musique, thème récurrent et fil conducteur du roman.
Tout au long de l’histoire, différents personnages sont évoqués, tout aussi pittoresques les uns que les autres avec toujours un point commun pour l’auteur : mêler imaginaire et faits historiques, le tout sur un air d’opéra qu’on croit entendre au loin, un récit marqué des traits d’humour propres à Pierre Thiry qui s’amuse à surprendre le lecteur par ses facéties : jeux de mots, anagrammes, rêveries, errances…
Au cours de sa lecture, le lecteur happé par le flot incessant d’informations culturelles et historiques, se retrouve au coeur de cet univers de la fantaisie cher à Pierre Thiry où L’Histoire avec un grand H sera détournée à travers une histoire rocambolesque ciselée au gré de l’imaginaire de l’auteur qui donne de Rouen une vision onirique.
Le style de l’auteur:
Le style de l’auteur se veut avant tout dense avec de nombreuses références littéraires et historiques, jalonnant les multiples digressions qui submergent le lecteur au fil du livre au risque pour lui de s’y noyer. Perdu quelque part dans « L’Histoire », il en oublie un peu « l’histoire » mais finit toujours par retrouver sa route en ne perdant jamais de vue le pont qui demeure le pivot central autour duquel s’articulent les rebondissements qui conduisent au dénouement . Le lecteur doit se laisser porter sans résister, sans se poser des questions pour sortir de ce labyrinthe, où s’imbriquent plusieurs récits.
Mon avis :
Ce livre est symbolique de l’envie de cet auteur de voir la réalité à travers son regard espiègle, poétique et passionné. Passion des mots, des choses, des êtres, de l’Histoire, de la culture… Le chat noir au chapeau melon au nom de Charles Hockolmess , est emblématique de cette importance pour lui de s’éloigner de la banalité pour en extraire la part mystique et fantastique qui redonne un goût à ce qui semble si commun : les rêveries de ce chat nous emportent bien malgré nous.
Ainsi, si nous partons au début de notre lecture à la recherche d’un vélo, cette « en » quête nous fait surtout découvrir les différents visages de la ville de Rouen et nous entraîne dans un vibrant hommage que rend l’auteur à Gustave Flaubert à travers de nombreuses citations qui ponctuent notre lecture et l’enrichissent de ce souci du détail qu’avait Gustave Flaubert en apportant à son écriture une douce musicalité, la musique résonne en écho à l’histoire, le lien est permanent.
Pour moi, un livre n’est pas un autre livre, chaque livre est habité de l’âme de son auteur et c’est ainsi que j’ai voulu lire cette « tentative » de roman de Pierre Thiry sans avoir d’exigence juste en communiant à cet amour des mots qu’a l’auteur qui plus qu’un pont lancé au lecteur est une véritable invitation à quitter sa réalité pour le temps d’une lecture voyager à bord de son voilier de mots tout en écoutant les accords d’une contrebasse ….Une belle invitation qu’on ne peut refuser et qui promet forcément des moments qui nous échappent, qui nous surprennent, qui nous déroutent, qui nous enrichissent…
Cette nouvelle fantaisie littéraire de Pierre Thiry est à découvrir sur son site : http://charles-hockolmess.e-monsite.com/
Maryse de Mes mots de vie